Des tortures sur fond de trafic rejugées à Paris, après des soupçons de corruption de jurés
Lors du premier procès à Bobigny, le verdict avait fuité avant même d’être prononcé : six personnes accusées de tortures sur fond de trafic de cannabis, sont rejugées à partir de mardi à Paris, dans une affaire où planent des soupçons de corruption de jurés.
7 février 2019, à Bobigny, le procès des commanditaires d’un trafic de drogue, jugés pour la séquestration ultraviolente d’un convoyeur et d’un dealer qu’ils soupçonnaient d’avoir volé une cargaison de cannabis, s’achève.
La cour d’assises de Seine-Saint-Denis – composée de trois magistrats professionnels et six jurés citoyens tirés au sort – doit bientôt rendre son verdict. Mais, avant même qu’elle ne revienne dans la salle pour prononcer sa décision, le verdict circule déjà dans les rangs du public.
Trois des cinq principaux accusés sont acquittés. Les deux autres, les seuls à avoir reconnu leur implication, sont condamnés à 7 et 14 ans de prison.
« D’avoir le délibéré avant le retour de la cour, c’était hallucinant », se souvient Anne-Charlotte Mallet, avocate du convoyeur. Coups, brûlures: cet homme de 50 ans avait détaillé à la barre les trois jours de sévices subis en 2014 après la disparition de plus de 70 kilos d’herbe de cannabis qu’il ramenait d’Espagne.
Six accusés seront rejugés à partir de mardi et jusqu’au 19 juin par la cour d’assises de Paris, après l’appel formé par le parquet. Dans la foulée du verdict de Bobigny, une information judiciaire, toujours en cours, avait aussi été ouverte pour violation du secret des délibérés et corruption de jurés.
Cet été, trois hommes ont été mis en examen dans cette affaire. L’un, qui était juré au procès, pour « violation du secret des délibérés ». Les deux autres pour « acte d’intimidation envers un juré afin d’obtenir une décision favorable, association de malfaiteurs et recel de violation du secret de l’instruction ». D’abord placés tous deux en détention provisoire, l’un est depuis le confinement sous contrôle judiciaire, explique le parquet de Bobigny.
Mardi, Me Mallet demandera que le procès se tienne à huis clos, comme elle l’avait fait en première instance mais sans l’obtenir, pour éviter les risques « de pressions et d’intimidations ».
Huis clos ou non, Me Chloé Arnoux, dont le client avait été acquitté en première instance, espère elle aussi un procès « serein », où le volet corruption de jurés, « l’affaire dans l’affaire », « ne vienne pas polluer la faiblesse des éléments à charge contre mon client ».